77-78 (Le génie découvre un système; le talent moyen le stéréotype, ...)

Nyomtatóbarát változat

77–Le génie découvre un système; le talent moyen le stéréotype, jusqu'au jour où il est vais en pièces par un nouveau génie. Il est dangereux pour une armée d'être conduite par les vétérans, car, de l'autre côté. Dieu peut mettre Napoléon.

78– Quand la connaissance est fraîche en nous, elle est invincible; vieille, elle perd sa vertu. Parce que Dieu va toujours de l'avant.

Sri Aurobindo parle ici d'une connaissance par inspiration ou révélation, quand quelque chose descend subitement et illumine la compréhension. Tout d'un coup, on a l'impression de savoir une certaine chose pour la première fois, parce qu'elle vient directement du domaine de la Lumière, de la Connaissance vraie, et elle arrive avec toute sa puissance innée de vérité — ça vous illumine. Et quand on vient de la recevoir, en effet, il semble que rien ne puisse résister à cette Lumière-là. Et si l'on prend soin de la laisser agir en soi, elle fait autant de transformation qu'elle est capable d'en faire dans son propre domaine.

C'est une expérience qu'on peut avoir souvent. Quand cela arrive et pour un certain temps — pas très longtemps —, tout semble s'arranger tout naturellement autour de cette Lumière. Et puis, petit à petit, elle se mélange avec le reste; la connaissance intellectuelle demeure— elle s'est formulée d'une façon ou d'une autre; cela, ça reste —, mais c'est comme si c'était vide. Cela n'a plus cette puissance de propulsion qui transforme tous les mouvements de l'être à cette image. Et c'est cela que Sri Aurobindo veut dire : le monde va vite, le Seigneur avance toujours, et tout cela, c'est une queue qu'il laisse derrière Lui, mais qui n'a plus la même puissance immédiate et toute-puissante du moment où Il l'a projetée dans le monde.

On a l'impression que c'est comme une pluie de vérité qui tombe — tous ceux qui sont capables d'en attraper, ne serait-ce qu'une goutte, reçoivent une révélation; mais à moins qu'ils n'avancent eux-mêmes avec une rapidité fantastique, le Seigneur avec Sa pluie de vérité commence à être très loin, et il faut courir beaucoup pour la rattraper!

C'est cela qu'il veut dire.

Oui, mais pour que cette connaissance ait vraiment un pouvoir de transformation...

Oui, c'est la Connaissance supérieure, la Vérité qui s'exprime, ce que Sri Aurobindo appelle "la Connaissance vraie", et c'est cette Connaissance qui transforme toute la création. Mais c'est comme s'il laissait tomber cela tout le temps, n'est-ce pas, et il faut se dépêcher beaucoup pour ne pas être en retard ! (Mère rit)

Mais tu n'as jamais eu cette sensation d'un éblouissement dans la tête? Et puis cela se traduit par : "Ah! mais oui!"—quelque chose que l'on savait intellectuellement quelquefois, mais c'était terne, c'était sans vie, et, tout d'un coup, ça vient comme une puissance formidable qui arrange tout au-dedans de la conscience autour de cette Lumière-là. Ça ne dure pas très longtemps. Quelquefois ça ne dure que quelques heures, quelquefois ça dure quelques jours, mais jamais plus longtemps que cela, à moins qu'on ne soit très lent dans son mouvement. Et pendant ce temps-là, n'est-ce pas, la Source de la vérité va, va, va...

Tout cela, ce sont des transformations psychologiques, mais quand il s'agit de la Matière et du corps, quelle connaissance faut-il?

Ça, mon petit, je ne peux rien dire pour le moment, parce que je ne le sais pas.

C'est un autre genre de connaissance?

Non, je ne pense pas.

(silence)

C'est peut-être un autre genre d'action, mais ce n'est pas un autre genre de connaissance.

(silence)

Au fond, on ne pourra parler de ce qui transforme la Matière que quand la Matière sera, au moins, un peu transformée, qu'il y aura un commencement de transformation. Alors on pourra parler du processus. Mais pour le moment...

(silence)

Mais n'importe quelle transformation dans l'être, sur n'importe quel plan, a toujours une répercussion sur les plans inférieurs. Il y a toujours une action — même pour ces choses qui semblent être purement intellectuelles, elles ont une répercussion sur la construction du cerveau, sûrement.

Et ces sortes de révélations ne se produisent que dans un mental silencieux — en tout cas au repos ; un mental tout à fait tranquille et immobile, autrement ça ne vient pas. Ou si ça vient, on ne s'en aperçoit pas avec tout le bruit qu'on fait. Et naturellement, cela aide à. établir de mieux en mieux cette. tranquillité, ce silence, cette réceptivité. Cette impression de quelque chose. de si immobile, mais pas fermé — immobile mais ouvert, immobile mais réceptif—, c'est une chose qui s'établit justement par le nombre de ces expériences. Il y a une grande différence entre un silence mort, terne, "irresponsif", et le silence réceptif d'un mental apaisé. Cela fait une grande différence. Mais cela, c'est le résultat de ces expériences-là. Tous les progrès que nous faisons sont toujours, tout naturellement, le résultat de vérités qui viennent d'en haut.

Cela a un effet, toutes ces choses ont un effet sur le fonctionnement du corps — fonctionnement des organes, fonctionnement cérébral, fonctionnement des nerfs, etc. Et cela, sûrement, se produira avant, longtemps avant un effet sur la forme extérieure.

Et au fond, quand les gens parlent de transformation, ils pensent surtout à une transformation imagée, hein? Une belle apparence! lumineuse, souple, plastique, changeant à volonté. Mais cette chose très peu esthétique de la transformation des organes, on n'y pense pas beaucoup ! Et pourtant, c'est certainement ce qui se produira en premier, longtemps avant la transformation de l'apparence.

Sri Aurobindo parlait du remplacement des organes par le fonctionnement des "chakra 1 ".

Oui, oui. Il a dit trois cents ans! (Mère rit.)

(silence)

Parce que, il suffit de réfléchir, on comprend facilement : s'il s'agissait d'arrêter quelque chose et de commencer quelque chose d'autre, cela, ça peut se faire assez rapidement. Mais tenir un corps vivant (n'est-ce pas, qu'il continue à fonctionner) et puis qu'en même temps il y ait un fonctionnement nouveau suffisant pour qu'il puisse rester vivant, et une transformation — cela fait une sorte de combinaison très difficile à réaliser. Je me rends compte de cela très bien, très bien... du temps immense qu'il faut pour que cela puisse se faire sans catastrophe.

Surtout, n'est-ce pas, si nous en venons au cœur. Le cœur remplacé par le centre de la Puissance... une puissance dynamique formidable! (Mère rit) À quel moment on va supprimer la circulation et jeter la Force?

C'est difficile.

(silence)

Dans la vie ordinaire, on pense les choses, puis on les fait—c'est juste l'opposé! Dans cette vie, il faut d'abord le faire et puis, après, on comprend, mais longtemps après. Il faut d'abord faire, sans penser. Si l'on pense, on ne fait rien de bon. C'est-à-dire que l'on retourne à la vieille manière.

6 octobre 1962

 


1 Centres de conscience situés dans le corps subtil, qui s'éveillent et deviennent actifs par la pratique du yoga. (En arrière)

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