193.-196.
193 — L’existence de la pauvreté est la preuve d’une société injuste et mal organisée, et nos charités publiques ne sont que le premier éveil tardif d’une conscience de voleur.
194 — Vâlmîki, notre ancien poète épique, inclut parmi les signes d’un état social juste et éclairé, non seulement l’instruction universelle, la moralité et la spiritualité, mais ceci aussi, que nul ne soit obligé de manger une nourriture grossière, que tous soient rois et oints, et que personne ne vive comme un mesquin et méprisable esclave du luxe.
195 — L’acceptation de la pauvreté est noble et bienfaisante pour une classe ou un individu, mais elle devient fatale et appauvrit la richesse de la vie et son épanouissement si elle est perversement organisée et que l’on en fasse un idéal général ou national.
196 — La pauvreté n’est pas plus une nécessité pour la vie sociale que ne l’est la maladie pour un corps naturel ; de mauvaises habitudes de vie et l’ignorance de notre organisation vraie sont, dans les deux cas, les causes pécheresses d’un désordre évitable.
Douce Mère,
Un jour viendra-t-il où il n’y aura plus de pauvres et
plus de souffrances dans le monde ?
Ceci est absolument certain pour tous ceux qui comprennent
l’enseignement de Sri Aurobindo et ont foi en lui.
C’est avec l’intention de créer un endroit où il puisse en être
ainsi que nous voulons fonder Auroville.
Mais pour que cette réalisation soit possible, il faut que chacun
fasse effort pour se transformer lui-même, car la majorité
des souffrances des êtres humains est le produit de leurs propres
erreurs, physiques et morales.
8 novembre 1969
Comment crois-tu qu’à Auroville il n’y aura plus de souffrance — tant que les gens qui viendront vivre à Auroville seront des hommes de ce même monde, nés avec les mêmes faiblesses et les mêmes défauts ?
Je n’ai jamais pensé qu’il n’y aurait plus de souffrance à
Auroville, parce que les hommes, tels qu’ils sont, aiment la
souffrance et l’appellent, tout en la maudissant.
Mais on tâchera de leur enseigner à aimer vraiment la paix et
à essayer de pratiquer l’égalité d’âme.
C’est de la pauvreté involontaire et de la mendicité dont je
voulais parler.
La vie à Auroville sera organisée de telle sorte que cela n’existera
pas — et si des mendiants viennent du dehors, ou bien ils
devront partir, ou bien on les hospitalisera et leur apprendra la
joie du travail.
9 novembre 1969
Quelle est la différence fondamentale entre l’idéal de l’Ashram et celui d’Auroville ?
Il n’y a pas de différence fondamentale dans l’attitude à l’égard
de l’avenir et du service du Divin.
Mais les gens de l’Ashram sont considérés comme ayant
consacré leur vie au yoga (excepté naturellement les élèves qui
ne sont ici que pour leurs études et à qui l’on ne demande pas
d’avoir fait leur choix dans la vie).
Tandis qu’à Auroville, la seule bonne volonté de faire une
expérience collective pour le progrès de l’humanité suffit pour
être admis.
10 novembre 1969