Les questions liées à l'inconscient et le sort après la mort
Cet Entretien est basé sur le chapitre V de Les Bases du Yoga, "La conscience physique, le subconscient, le sommeil et les rêves, la maladie". Ce soir, la lecture s'achève sur les lignes suivantes :
"C'est principalement à cause du subconscient que tout va se répétant et que jamais rien ne change qu'en apparence. C'est pourquoi les gens disent que le caractère ne peut être transformé, et c'est aussi la cause au constant retour de choses dont on espérait être débarrassé pour toujours. [...] De plus tout ce qui est réprimé, mais pas complètement rejeté, s'y enfonce et y demeure comme des graines prêtes à monter à la surface ou à germer à la première occasion."
Mais ce n'est pas sans espoir ; parce que si c'était sans espoir, jamais nous ne pourrions obtenir la transformation physique.
Voilà. Maintenant, questions.
Douce Mère, comment faut-il rejeter quelque chose du vital pour que cela n'entre pas dans la subconscience ?
Ah!
Il y a une grande différence entre repousser une chose simplement parce qu'on n'en veut pas, et changer la condition de sa conscience qui fait que cette chose devient totalement étrangère à votre, nature. D'habitude, quand on a un mouvement dont on ne veut pas, on le chasse, on le repousse, mais on ne prend pas la précaution de trouver en soi ce qui a servi et ce qui sert encore de soutien à ce mouvement, la tendance spéciale, le pli de conscience qui fait que cette chose est capable d'entrer dans la conscience. Si au contraire, au lieu simplement de faire un mouvement de réprobation et de rejet, on entre profondément dans sa conscience vitale et qu'on trouve le support, c'est-à-dire comme une petite vibration spéciale qui est enfouie très profondément dans un coin, souvent dans un coin si obscur qu'on a de la difficulté à la trouver là ; si on part en chasse, c'est-à-dire si on s'intériorise, si on se concentre, si on suit comme à la piste ce mouvement jusqu'à son origine, on trouve quelque chose comme un tout petit serpent lové, quelque chose, quelquefois, de tout petit, pas plus grand qu'un pois, mais qui est très noir et enfoncé très fort.
Et alors, il y a deux procédés : ou mettre une lumière tellement intense, la lumière d'une Conscience de Vérité tellement forte, que ça sera dissout ; ou bien attraper ça comme avec une pince, le tirer de l'endroit où ça se trouve et le mettre en face de sa conscience. Le premier procédé est radical, mais on n'a pas toujours à sa disposition cette Lumière de Vérité, alors on ne peut pas toujours l'employer. Le second procédé, on peut le prendre, mais ça fait mal, ça fait un mal aussi grand que si on vous arrache une dent ; je ne sais pas si on vous a jamais arraché une dent, mais ça fait aussi mal que ça, et ça fait mal là, comme ça (Mère indique le centre de la poitrine et fait un mouvement de torsion). Et généralement, on n'est pas très courageux. Quand ça fait très mal, eh bien, on essaye d'effacer ça comme ça (geste), et c'est pour cela que les choses persistent. Mais si on a le courage de le prendre et de tirer jusqu'à ce que ça soit là et de le mettre en face de soi, même si ça fait très, très mal... alors le tenir comme ça (geste) , jusqu'à ce qu'on puisse voir clair, et puis le dissoudre, alors c'est fini. La chose ne se cachera plus jamais dans le subconscient et ne reviendra jamais plus vous ennuyer. Mais c'est une opération radicale. Il faut le faire comme une opération.
Il faut d'abord avoir beaucoup de persévérance dans la recherche, parce que généralement quand on se met à la recherche de ces choses, le mental vient donner cent et une explications favorables pour que vous n'ayez pas besoin de chercher. Il vous dit : "Mais non, ce n'est pas du tout votre faute ; c'est ceci, c'est cela, ce sont les circonstances, ce sont les gens, ce sont des choses reçues du dehors" — toutes sortes d'excellentes excuses, ce qui fait qu'à moins que vous ne soyez très ferme dans votre résolution, vous laissez aller et puis c'est fini ; et alors au bout de quelque temps toute l'affaire est à recommencer, l'impulsion mauvaise ou la chose dont vous ne vouliez pas, le mouvement dont vous ne vouliez pas revient, et alors il faut tout recommencer, jusqu'au jour où vous aurez décidé de faire l'opération. Quand l'opération est faite, c'est fini, on est libre. Mais, comme je dis, il faut se méfier des explications mentales, parce que chaque fois on dit : "Oui, oui, les autres fois c'était comme ça, mais cette fois-ci vraiment, vraiment ce n'est pas ma faute, ce n'est pas ma faute." Voilà. Alors c'est fini, c'est à recommencer. Le subconscient est là, la chose descend, reste là, très confortable, et le premier jour où vous n'êtes pas sur vos gardes, hop ! ça remonte et ça peut durer ; j'ai connu des gens pour qui ça avait duré plus de trente-cinq ans, parce qu'ils n'avaient pas résolu une seule fois de faire ce qu'il fallait.
Oui, ça fait mal, ça fait un peu mal, c'est tout ; après c'est fini. Voilà.
Rien?... Personne n'a rien à dire? Toi, non? Tu as quelque chose à demander ? Toi ?
Hors du sujet.
Hors du sujet ? Ce sujet comporte tout. Alors comment cela peut-il être hors du sujet ? Le subconscient, on nous a dit, c'est universel.
Mère, quand on est ici, et qu'on suit le yoga intégral, ici, n'est-ce pas...
"On est ici", ça veut dire "on est à l'Ashram" ou "on est dans la classe" ? Dans la classe ? Non ! (rires)
Nous sommes dans la classe et à l'Ashram aussi.
Ah bon ! Alors ?
Est-ce que c'est sûr que dans la prochaine vie aussi on sera ici, à l'Ashram ? Ou bien est-ce qu'on s'en ira quelque part pour d'autres expériences ?
Ça dépend des cas. D'abord qu'est-ce que tu appelles la prochaine vie ? C'est-à-dire les gens qui ont laissé leur corps et qui en prendront un autre ?
Oui.
Mais cela dépend absolument de la condition dans laquelle ils sont morts et de leur dernier vœu, et de la résolution du psychique. Ce n'est pas une chose mécanique ou forcée, c'est pour chacun différent.
Je vous ai déjà dit beaucoup de fois que, pour le destin qui suit la mort, le dernier état de conscience est généralement le plus important. C'est-à-dire que si au moment de mourir on a cette aspiration intense de revenir continuer son œuvre, alors les conditions s'arrangent pour que ça puisse se faire. Mais il y a toutes les possibilités, pour ce qui se passe après la mort. Il y a des gens qui retournent dans le psychique. N'est-ce pas, je vous ai dit que l'être extérieur, c'est très rare qu'il se conserve ; alors nous parlons seulement de la conscience psychique qui, elle, persiste toujours. Et alors il y a des gens pour qui le psychique retourne dans le domaine psychique pour assimiler l'expérience qu'ils ont eue et préparer leur vie future. Ça peut prendre des siècles, cela dépend des gens.
Plus le psychique est évolué, plus il est près de sa complète maturité, plus il y a de temps entre les naissances. Il y a des êtres qui ne se réincarnent qu'après mille ans, deux mille ans.
Plus on est au début de la formation, plus les réincarnations sont proches ; et quelquefois même, tout à fait au degré inférieur, quand on est tout près de l'animal, ça fait comme ça (geste), c'est-à-dire qu'il n'est pas rare que les gens se réincarnent dans les enfants de leurs enfants, comme ça, quelque chose comme ça, ou juste la génération suivante. Mais ça, c'est toujours un degré d'évolution très primitif, et l'être psychique n'est pas très conscient, il est en état de formation. Et à mesure qu'il est plus développé, les réincarnations, comme je dis, s'éloignent l'une de l'autre. Quand l'être psychique est totalement développé, qu'il n'a plus besoin de revenir sur la terre pour son développement, qu'il est absolument libre, il a le choix entre ne plus revenir sur terre s'il trouve que son travail est ailleurs, ou s'il aime mieux rester dans la conscience purement psychique, sans réincarnation ; ou bien il peut venir quand il veut, comme il veut, où il veut, parfaitement consciemment. Et il y en a qui se sont unis avec des forces d'ordre universel et des entités de l'Overmind¹ ou d'ailleurs, qui restent tout le temps dans l'atmosphère terrestre et qui prennent des corps successivement pour le travail. Ce qui fait que de la minute où l'être psychique est complètement formé, et absolument libre — quand il est complètement formé, il devient absolument libre —, il peut faire tout ce qu'il veut, cela dépend de ce qu'il choisit; par conséquent on ne peut pas dire : "Ça sera comme ceci, ça sera comme cela" ; il fait exactement ce qu'il veut et il peut même (c'est arrivé) annoncer, au moment de la mort du corps, quelle sera sa prochaine réincarnation et ce qu'il fera, et choisir déjà ce qu'il va faire. Mais avant cet état-là, qui n'est pas très fréquent — cela dépend absolument du degré de développement du psychique et de l'espoir formulé par la conscience intégrale de l'être —, il y a encore la conscience mentale, vitale et physique, unie à la conscience psychique ; alors à ce moment-là, au moment de la mort, au moment de quitter le corps, il formule un espoir, ou une aspiration ou une volonté, et généralement cela décide de la vie future.
Alors on ne peut pas poser une question, dire : "Qu'est-ce qui se passe et qu'est-ce qu'il faut faire ?" Toutes les choses possibles se passent, et tout peut être fait.
Chacun a un cas dans l'esprit : il pose une question générale, mais dans son esprit c'est une question tout à fait particulière ; mais ça, ce sont des choses dont on ne discute pas en public.
Le 16 mars 1955