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96 - 100 (Que ton âme fasse l'expérience de la vérité des Écritures, puis, si...)

Nyomtatóbarát változat

96 — Que ton âme fasse l'expérience de la vérité des Écritures, puis, si tu le veux, raisonne ton expérience et donne-lui une expression intellectuelle, et même alors méfie-toi de tes formules, mais ne doute jamais de ton expérience.

Cela ne demande pas d'explications.

C'est-à-dire qu'il faudrait expliquer, pour les enfants, que la formule, quelle qu'elle soit, les Écritures, quelles qu'elles soient, sont toujours une diminution de l'expérience, inférieures à l'expérience.

Il y a peut-être des gens qui ont besoin de le savoir.

97 — Quand tu affirmes l'expérience de ton âme et que tu nies, parce qu'elle est différente, l'expérience d'une autre âme, sache que Dieu se moque de toi. N'entends-tu pas son rire amusé derrière le rideau de ton âme?

Oh! c'est charmant.

On peut seulement faire une réflexion souriante : ne doute jamais de ton expérience, parce que ton expérience est la vérité de ton être, mais n'imagine pas que cette vérité soit universelle; et sur la base de cette vérité-là, ne nie pas la vérité des autres, parce que, pour chacun, son expérience est la vérité de son être. Et une Vérité totale ne serait que l'ensemble de toutes ces vérités individuelles... plus, l'expérience du Seigneur Lui-même!

98 — La révélation est une vision directe de la Vérité, une audition directe ou un souvenir inspiré, drishti, shrouti, smriti ; c'est l'expérience la plus haute et toujours susceptible d'un renouveau d'expérience. La parole des Écritures est la suprême autorité, non parce que Dieu l'a prononcée, mais parce que l'âme l'a vue.

Je suppose que c'est la réponse à la croyance biblique des "commandements de Dieu" reçus par Moïse, que le Seigneur aurait prononcés Lui-même et que Moïse aurait entendus — c'est une façon détournée de dire (Mère rit) que ce n'est pas possible.

"La suprême autorité parce que l'âme l'a vue" — mais ce ne peut être une suprême autorité que pour l'âme qui l'a vue, pas pour toutes les âmes. L'âme qui a eu cette expérience et qui a vu, pour elle c'est une suprême autorité, mais pas pour les autres.

C'était l'une des choses qui me faisait réfléchir quand j'étais tout enfant, ces dix "commandements", qui sont d'ailleurs d'une banalité extraordinaire. "Aime ton père et ta mère... ne tue pas..." c'est d'une écœurante banalité. Et Moïse est monté sur le Sinaï pour entendre cela.

Maintenant, je ne sais pas si Sri Aurobindo pensait aux Écritures indiennes... Il y a eu des Écritures chinoises aussi...

(silence)

De plus en plus, mon expérience est que la révélation (cela vient, n'est-ce pas), la révélation peut s'appliquer universellement, mais, dans sa forme, elle est toujours personnelle — toujours personnelle.

C'est comme si l'on avait un angle de vision de la Vérité. C'est forcément, forcément un angle, de la minute où c'est mis en mots.

On a l'expérience, sans mots et sans pensée, d'une espèce de vibration qui vous donne la sensation d'une vérité absolue, et puis, si l'on reste très immobile, sans rien chercher à savoir, au bout d'un certain temps c'est comme si cela passait à travers un filtre, et cela se traduit par une sorte d'idée. Puis cette idée... c'est une idée encore un peu floue, c'est-à-dire très générale, mais si l'on reste encore très immobile, attentif et silencieux, cela passe par un autre filtre, et alors c'est une sorte de condensation qui se produit, comme des gouttes, et cela devient des mots.

Mais cela, quand on a eu l'expérience tout à fait sincèrement (n'est-ce pas, que l'on ne se "monte pas le coup"), c'est nécessairement seulement un point, une façon de dire la chose, c'est tout. Et ce ne peut être que cela. Il y a, d'ailleurs, une observation très évidente, c'est que quand on se sert habituellement d'une certaine langue, cela vient dans cette langue; pour moi, cela vient toujours en anglais ou en français — cela ne vient pas en chinois, cela ne vient pas en japonais ! Les mots sont nécessairement anglais ou français; et quelquefois un mot sanskrit, mais parce que, physiquement, j'ai appris le sanskrit; il est arrivé que j'entende (pas physiquement) du sanskrit prononcé par un autre être, mais cela ne se cristallise pas, cela reste dans le flou; et quand je reviens à une conscience tout à fait matérielle, je me souviens d'un certain son vague, mais pas d'un mot précis. Par conséquent, c'est toujours un angle individuel, de la minute où cela se formule.

Il faut avoir une sorte de sincérité très austère. On est pris par un enthousiasme, parce que l'expérience apporte une puissance extraordinaire, la Puissance est là — elle est là avant les mots, elle diminue avec les mots — mais la Puissance est là, et avec cette Puissance on se sent très universel, on a l'impression : "C'est une Révélation universelle" — oui, c'est une révélation universelle, mais quand tu dis cela avec des mots, ce n'est plus universel; cela ne s'applique plus qu'aux cerveaux qui sont construits pour comprendre cette façon de dire. La Force est derrière, mais il faut dépasser les mots.

(silence)

De plus en plus me viennent ces sortes de choses que je griffonne sur un bout de papier, et c'est toujours le même processus : toujours, d'abord, une sorte d'éclatement — c'est comme un éclatement de puissance de vérité, cela fait comme un grand feu d'artifice bien blanc... (Mère sourit) beaucoup plus qu'un feu d'artifice! Et puis ça roule et ça roule (geste au-dessus de la tête), ça travaille et ça •travaille; puis l'impression d'une idée (mais l'idée est dessous, l'idée est comme un revêtement) et l'idée contient sa sensation, elle amène aussi la sensation — la sensation était avant, mais sans idée, alors on ne pouvait pas définir la sensation. Il n'y a qu'une chose : c'est toujours un éclatement de Pouvoir lumineux. Et puis, après, si l'on regarde cela et que l'on reste bien tranquille, que la tête se taise surtout — tout se tait (geste immobile tourné vers le haut), alors, tout d'un coup, quelqu'un parle dans la tête — quelqu'un parle. Et c'est cet éclatement qui parle. Alors je prends un crayon, un papier et j'écris. Mais entre ce qui parle et ce qui écrit, il y a encore un petit passage, là, qui fait que quand c'est écrit, il y a quelque chose là-haut qui n'est pas satisfait; alors je me tiens encore tranquille : "Non, pas ce mot-là, celui-ci" — quelquefois il faut deux jours pour que ce soit tout à fait définitif. Mais ceux qui se satisfont de la puissance de l'expérience, ils vous bâclent cela et ils vous envoient dans le monde des révélations sensationnelles qui sont des déformations de la Vérité.

Il faut être très pondéré, très tranquille, très critique — surtout très tranquille, silencieux, silencieux, silencieux; pas chercher à empoigner l'expérience : "Ah! qu'est-ce que c'est, qu'est-ce que c'est?", alors on abîme tout— mais regarder, regarder très attentivement. Et dans les mots, il y a un restant, quelque chose qui reste de la vibration première (si peu!), mais il y a quelque chose, quelque chose qui vous fait sourire, qui est agréable, qui pétille comme un vin mousseux, et puis ici (Mère montre un mot ou un passage d'une note imaginaire) c'est terne; alors on regarde avec sa connaissance de la langue, ou avec le sens du rythme des mots : "Là, il y a un caillou", il faut enlever le caillou; puis on attend, et tout d'un coup cela vient, poff! cela tombe à sa place, le vrai mot. Si l'on est patient, au bout d'un ou deux jours, cela devient tout à fait exact.

3 février 1964

99 —La parole de l'Écriture est infaillible; c'est dans l'interprétation qu'y ajoutent le cœur et la raison que se glisse l'erreur.

Je ne suis pas tout à fait sûre que ce ne soit pas ironique... Aux gens qui disent "L'Écriture est infaillible", il répond : "Oui, oui, c'est entendu, les Écritures sont infaillibles, mais méfie-toi de ta propre compréhension!"

Mais voici la parole de Vérité :

100 — Jette loin de toi toute bassesse, toute étroitesse, toute superficialité dans ta pensée et ton expérience religieuses. Sois plus vaste que les plus vastes horizons, plus élevé que les plus hauts Kanchanjanghâ, plus profond que les plus profonds océans.

5 février 1964

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